La crise de la zone Euro face à la propagande

La crise de la zone Euro face à la propagande

La crise de 2008 a été douloureuse pour la majorité des pays développés mais l'incompétence et l'obstination idéologique des dirigeants européens de la zone Euro en a aggravé et prolongé les effets. Les conséquences économiques et politiques s'y feront sentir longtemps.

C'est pourquoi la vague d'optimisme face à un reprise tardive et timide est indécente et déplacée. Le Discours sur l'état de l'Union 2017 de Jean-Claude Juncker est particulièrement délirant.

Ensemble, nous avons montré que l'Europe peut obtenir des résultats concrets pour ses citoyens, quand et là où c'est nécessaire.

Ouais. Certains, comme l'INSEE, sont un peu plus sobres et honnêtes dans leurs appréciations mais cachent néanmoins l'étendue du désastre infligé au bloc euro par ses dirigeants et le coût sur le long-terme. Un article de l'économiste William Mitchell met en perspective les performances récentes de la zone et c'est loin d'être brillant.

À commencer par la croissance. Juncker est prompt à souligner que

Nous entrons à présent dans la cinquième année d'une reprise économique qui se fait réellement sentir dans chacun des États membres. Ces deux dernières années, la croissance a été plus forte dans l'Union européenne qu'aux États-Unis. Elle se chiffre maintenant à plus de 2 % pour toute l'Union et à 2,2 % pour la zone monétaire.

C'est vrai mais les États-Unis sont sortis de récession et ont récupéré leur niveau d'avant-crise après seulement 15 trimestres, un résultat qui n'a été atteint que 3 ans après par l'Union Européenne et un semestre de plus a été nécessaire pour la zone Euro. Le coût en terme de production et de potentiel de croissance a été ainsi bien plus sévère pour l'UE (et en particulier pour la zone Euro) que pour les États-Unis. Certains pays comme l'Australie n'ont pas connu de récession parce qu'ils ont mis en place un important stimulus budgétaire très tôt dans la crise et l'ont maintenu assez longtemps pour assurer la croissance.

Le PIB réel de la zone Euro n'est supérieur que de 4,1% à son niveau au premier trimestre 2008. Les chiffres sont de 12,7% pour les États-Unis, 9,1% pour le Royaume-Uni, 11,4% pour la Norvège et 23,7% pour l'Australie. Les piètres performances de la zone Euro sont choquantes et complètement anormales.

Eurozone_US_UK_Aust_Real_GDP_Peak_to_June_2017

Au niveau de l'emploi aussi, la situation est loin d'être satisfaisante. Sans grande surprise, le taux d'emploi est plus faible aujourd'hui qu'au premier trimestre 2008 et le taux de chômage reste élévé plus de neuf ans après le début de la crise.

EU28_Euro19_UR_March_2008_June_2017

Ce sont des chiffres globaux, les divergences entre les États membres sont importantes (entre la Grèce et le Royaume-Uni par exemple en ce qui concerne l'emploi). Les chiffres sont encore plus alarmants quand on exclut l'Allemagne — le relatif succès allemand cache l'importance des dommages subis par les autres pays.

On peut enfin s'intéresser au taux d'investissement — la part de la formation du capital dans la valeur ajoutée — un bon indicateur du sentiment général et du potentiel de croissance d'une économie. Au début de la crise, le taux d'investissement était de 23,7% pour l'UE et de 24,1% pour la zone Euro. À la fin du premier semestre 2017, ces taux étaient de 20,3% pour l'UE et de 20,5% pour la zone euro. Ils sont nettement inférieurs à leur niveau d'avant-crise et sont actuellement en baisse.

Eurostat_IY_ratio_EU28_1995_June_2017

Eurostat_IY_ratio_Euro19_1995_June_2017

Vraiment pas de quoi sabrer le champagne. Certes, la zone euro a retrouvé le chemin de la croissance mais celle-ci est tardive, lente et divergente. De plus, les conséquences de l'austérité budgétaire pendant la crise se feront sentir pendant longtemps sous forme de faible croissance, de taux de chômage élevé et de dégradation des emplois. Sans même parler de la faiblesse préoccupante de notre taux d'investissement.

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